mardi 24 mai 2016

In The Canopy - Talking Monkeys

In The Canopy - Talking Monkeys (04/2016)
Il y a des groupes dont on tombe sous le charme dès les premières notes du premier morceau qui nous traverse les oreilles. Ça nous est tous arrivé, au moins une fois. Pour ma part c'est arrivé souvent, et ça continue. Je me dis que tant qu'on a ce genre de coup de foudre, c'est que le cœur et les oreilles fonctionnent correctement. D'un certain côté, c'est rassurant.
Je suis tombé dans les filets d'In The Canopy un soir de décembre 2012, à l'écoute de leur 1er EP "Never Return" que j'avais aussitôt chroniqué dans la foulée (lire chronique). Deux ans plus tard, leur 2ème EP "The Light Through", faisant suite à un passage à Rock en Seine, au Printemps de Bourges puis à l'émission de France Inter "On va tous y passer", confirmait ce qu'on pressentait: le potentiel du groupe commençait à éclater au grand jour (chronique).
Un an et des poussières plus tard, nous voici avec leur 1er LP: "Talking Monkeys" (04/2016). Plus que le passage de l'EP au véritable album, il va maintenant être intéressant d'étudier l'évolution musicale, de l'identité et plus généralement l'orientation suivie par le groupe.
Cet album a prit le temps de naître, près de 4 ans depuis leur date de formation. C'est dire si Joachim et sa bande n'ont pas bâclé la chose. A la manière de leurs compositions, le style s'est doucement mis en place, pour arriver aujourd'hui à ce rock atypique, hors format et décalé qui fait leur spécificité. Essayer de décrire la musique d'In The Canopy n'est pas facile. L'Art Rock n'est pas du prog' à proprement parler, mais enfin, ça y ressemble méchamment. Un rock où les rythmes changent sans cesse, avec une succession de montées et de baisses de régime et où les structures des compositions sont à géométries variables. Les atmosphères electro des premiers EP ont laissé la place à une ambiance beaucoup plus énergique, plus puissante. Le ton s'est nettement durci. La thématique de l'album a pour sa part contribué à l'apport de nouvelles sonorités, plus tribales. Le jeu de batterie et les percussions de Thomas s'en trouvent ainsi bien mieux mis en avant, ce dont on est loin de se plaindre ("Lightshot", "We Got Tears") !.. Des rythmes soutenus par des lignes de basse toujours aussi agréables et sautillantes ("Achtung Hunter", "Light Dark Light"). On n'occultera pas, de la même manière, le jeu évolutif des guitares et des claviers, ces derniers ayant tendance à rester bien plus en retrait qu'auparavant. Il n'y a que sur le superbe "Nightfall" qu'on retrouve les réminiscences des grandes nappes de claviers de "Never Return". Enfin, le style d'ITC est basé sur le chant et la voix de Joachim. Moins aérienne, moins haut perchée, elle n'a rien perdu de sa capacité à émouvoir et transporter l'auditeur vers les cimes... Rares sont les voix qui procurent chez moi autant d'émotion que sur "How Long" ou "Waiting to Die"; et techniquement il ne doit pas y avoir beaucoup de monde capable de chanter le bouleversant "Rules of Past" !

Sans parler de musique expérimentale ou innovante, le rock d'ITC reste avant-gardiste. Parce que hors norme et hors standards. Une musique subtile: on y trouve l'énergie, la douceur, le dynamisme et la puissance, mais à doses éparses, savamment distillées. Ce n'est jamais linéaire, plat ou redondant, mais au contraire varié, changeant, étonnant et.. détonnant. Je reprochais dernièrement dans une chronique la façon qu'ont certains de rester sagement "dans les clous". 
Ce que j'adore avec les musiciens d'In The Canopy, c'est qu'ils sont partout ailleurs...  




J-Yves


5/5: *****








Talking Monkeys - inthecanopy.bandcamp.com
1. Lightshot (3:04)
2. How Long (3:49)
3. Along With The Dancer (4:08)
4. Nightfall (3:59)
5. We Got Tears (3:35)
6. Waiting To Die (2:20)
7. Achtung Hunter (5:03)
8. Light Dark Light (3:40)
9. Catch A Predator (5:58)
10. Rules Of Past (3:55)

In The Canopy - www.inthecanopy.fr
Joachim Müllner: Chant
Thomas Martinez: Guitare
Maxime Lunel: Guitare, Claviers
Erwan Karren: Basse 
Thomas Chalindar: Batterie 



photo: (c) In The Canopy





samedi 21 mai 2016

Orange Bud - Peacock on an Iceberg

Orange Bud - Peacock on an Iceberg (04/2016)
Orange Bud, on connaît, du moins ceux qui lisent régulièrement ce blog. On en a parlé il y a plus de 2 ans pour la sortie de leur premier album "Losses" (lire chronique). Depuis, les rhônalpins, basés à Chambéry, ont poursuivi leur progression: participation à plusieurs festivals dont le Printemps de Bourges en 2013, réalisation de clips et enregistrement d'un EP "Acoustic Breathing" (2014) qui, comme son nom l'indique, est entièrement acoustique. En avril dernier, il viennent de sortir leur 2ème album, ce "Peacock on an Iceberg".
Groupe privilégiant la scène, il lui a fallu prendre sur lui pour réduire ses apparitions et se concentrer sur le présent objet, fruit d'un travail collectif aussi bien au niveau des compositions que des arrangements. 
Le résultat est net, dès la première écoute: les morceaux possèdent une réelle profondeur, les instrumentations sont plus riches et l'interprétation plus nuancée que sur "Losses". La couleur musicale reste la même: très proche d'un John Butler Trio ou d'un Ben Harper, le blues folk électrique proposé est toujours aussi balancé et charpenté ("Delicate Laces", "Oaks and Wolves"), dynamique et puissant ("Frenetic Bird", "When I Wanted"). Nouveauté: des morceaux aux rythmes décalés et changeants ("On My Stolen Ship", "Peacock on an Iceberg"), ou encore poétiques et atmosphériques ("Hanging by a Thread", "The Wild Wild Airs").


Les 40 minutes de l'album déroulent sans aucun temps mort ni baisse d'intensité. La variété des titres y est certainement pour beaucoup. Mais je noterais pour ma part une présence moins envahissante du chant que j'avais à l'époque (légèrement) regretté sur Losses. Pas que je n'aime pas la voix de Clémentine, au contraire ! (une belle voix chaude et puissante) mais est-ce un travail au niveau de la production (excellente !), ou bien de l'écriture ?.. le fait est que le chant s'en retrouve du coup bien mieux mis en valeur, au bénéfice de l'ensemble.
Facile d'écoute, très agréable, tantôt dansant, tantôt introspectif, nous avons là un bien bel objet qui se diffuse dans nos oreilles. On se régale des parties de slide-guitare, la contrebasse est ronde à souhait et la batterie sait à la fois rester discrète ou faire monter la sauce. Bref, c'est nickel.
Il serait vraiment dommage de passer à côté de cette petite merveille musicale, qui prouve s'il en était besoin que les Anglo-saxons sont loin d'avoir le monopole du blues folk de qualité. 



J-Yves

4/5: *****






Peacock on an Iceberg - orangebudmusic.bandcamp.com
1. Somersault Lullaby (3:57)
2. On My Stolen Ship (3:24)
3. Delicate Laces (4:09)
4. Frenetic Bird (3:25)
5. Oaks and Wolves (4:02)
6. Hanging by a Thread (1:47)
7. Peacock on an Iceberg (3:44)
8. Nine (4:30)
9. The Wild Wild Airs (4:18)
10. When I Wanted (3:59)
11. Next Fireworks (2:20)


Orange Bud:  www.orangebud.fr
Clémentine DUCHEMANN: Chant  
Thomas VOULHOUX: Guitares
Bastien FAMELART: Contrebasse
Matt SCHEIDECKER: Batterie


photo: (c) Arthur Hennard







vendredi 20 mai 2016

Jonas and I - These Days

Jonas and I - These Days (05/2016)
Jonas and I est un tout jeune groupe finlandais (Kuopio). Oui je sais: encore la Finlande ! Ben, j'y peux rien s'il s'y passe un tas de (bonnes) choses musicalement parlant, et variées. Parce qu'ici on ne va pas parler de prog ni de metal, les 2 grandes spécialités du pays, mais de folk. Un folk plaisant, doux, léger, harmonieux. Printanier.
Difficile de croire que ce "These Days", qui sort aujourd'hui même, est le premier album de Jonas et sa bande, tant il est cohérent, varié, maîtrisé et pour tout dire sans faux-pas. Les musiciens parviennent parfaitement à retranscrire dans leurs chansons leur jeunesse, leur fraîcheur, leur penchant pour la liberté et les grands espaces. Ils expliquent dans leur bio que certains titres ont été écrits pendant qu'ils voyageaient autour du monde, et on les croit volontiers parce que ça s'entend !
L'écoute est un réel plaisir, et vous file une sensation de bien-être qu'on rencontre rarement (surtout pour ceux d'entre nous habitués à écouter du metal-prog, du post-rock ou du hard...). "What You Do" ou "Alarm Clock" sont furieusement mélodieux et onctueux, "Liz" est délicate et entraînante, "These Days" vous fait respirer l'air des grands espaces à plein poumons, quand le splendide "Awake or Dreaming" vous invite à admirer un magnifique coucher de soleil.

Jonas and I fait partie de ces artistes qui proposent un folk "consistant", qui sort de l'ordinaire tout en ne révolutionnant pas le genre, soyons honnête. 
A l'instar d'un King Charles (lire chronique du "Gamble for a Rose"), d'une Jaylis (chronique "My Lonely Shadow") ou d'un Auguste (chronique "La Tristesse des Autoroutes"), on s'éloigne ici de ceux qui suivent les routes toute tracées ou qui perdent leur spontanéité originelle (cf. le décevant "Cleopatra" des Lumineers).
Printanier. Pas parce qu'on court derrière les papillons à moitié à poil dans les champs de coquelicots, mais parce qu'on retrouve les rayons de soleil, la lumière et la brise légère qu'on attendait avec impatience tout au long de l'hiver.
Un brin de fraîcheur, un vrai. Un folk bio, 100% naturel. On en redemande !



J-Yves


4/5: *****









These Days
1. Opening (1:05)
2. What You Do (3:35)
3. Alarm Clock (2:45)
4. Going Home (3:03)
5. Crossroads (4:50)
6. Liz (3:07)
7. Same Old Lane (3:30)
8. Awake or Dreaming (4:45)
9. These Days (3:15)
10. Goodbye (3:43)


Jonas and I - www.jonasandi.com - facebook
Roope Hakkarainen:vocals, guitar
Jonas Ursin: guitar, keys, vocals
Juho Väliaho: keys, vocals
Santeri Laitinen: bass, vocals
Antti Alvasto: drums, percussions

Guests:
Tero Holopainen: lapsteel
Antti Hevosmaa: trumpet, flugelhorn


photo: (c)Humu Records - Sampo Jaakola







mardi 17 mai 2016

Gatha: Renaissance - Casablanca Drivers: Donde Estoy ?


Gatha
Renaissance *****


Gatha - Renaissance (03/2016)
Gatha, dans la vraie vie, s'appelle Agathe. Originaire de Bordeaux, elle y suit les cours de violoncelle du conservatoire dès son plus jeune âge. Attirée aussi par la danse et le chant, son penchant pour l'écriture de chansons lui fera finalement choisir de devenir auteur-compositeur-interprète. Après un premier EP "Fuir" sorti en 2014, elle nous propose cette fois-ci un autre EP, "Renaissance" (25/03).
Il ressort de sa formation classique des orchestrations riches, nuancées et multiples. La pop de Gatha navigue entre sombre beauté et lumineuse intensité. Les compositions ne se cantonnent pas dans le standardisé couplet-refrain, mais évoluent, montent doucement en puissance... Le violoncelle, loin d'être omniprésent, laisse volontiers la place aux claviers électroniques et aux boîtes à rythme, pour donner à l'ensemble un aspect à la fois mélodieux et moderne, sans pour autant verser dans la facilité ou la simplicité. La voix sombre de Gatha, jamais fragile mais souvent sensuelle, donne à ces morceaux leur dualité spécifique, entre froideur des instruments et chaleur vocale.
Ne pas terminer cette chronique sans parler des textes (en français !): précis, délicats, à l'opposé du futile et de l'inconsistant qu'on croise trop souvent, et que certains préfèrent masquer derrière un anglais approximatif.
Ce n'est peut-être pas flamboyant, multicolore ou festif; disons plutôt que c'est intimiste, ténébreux, tourmenté et personnel. Gatha se confie plus qu'elle ne s'expose (cf. "Oublie tout"). Et non seulement c'est beau, mais c'est réussi.






Renaissance
1. Renaissance (4:02)
2. Léo (4:05)
3. Amours Avortées (3:30)
4. Les Marcheuses de la Nuit (4:35)
5. Oublie Tout (3:20)

Gatha - www.gatha.fr

Gatha: violoncelle, chant, musique, textes
Jean Thevenin: batterie








Casablanca Drivers
Donde Estoy ? *****


Casablanca Drivers - Donde Estoy ? (03/2016)
Les Casablanca Drivers, eux, nous viennent tout droit de la West Coast. Ni Los Angeles ni San Francisco, non, disons plutôt la côte ouest de la Corse, Ajaccio plus précisément. Formé en 2011 par 5 copains, le groupe sort son premier EP "2002Pizza" en 2014. S'ensuit une longue série de concerts et festivals qui les conduiront un peu partout en France et souvent à Paris. C'est d'ailleurs à la capitale qu'ils décident de s'installer pour enregistrer leur 2ème EP, ce "Donde Estoy ?" sorti le 23 mars dernier. 
Musicalement, le désormais trio propose un rock très années 80 avec quelques légères touches psychédéliques (plus visuelles que sonores) avec cette décontraction et cette nonchalance dont on affuble volontiers les habitants de l'île de beauté. Amateurs de clins d’œil, les musiciens se plaisent à disperser et éparpiller par-ci par-là quelques riffs à la Talking Heads ("The Shore of Danger"), ou à la Cure ("Red Man" et "La Ola") quand ce ne sont pas les prémices de l'electro à la Bowie de la trilogie berlinoise ou de Kraftwerk ("Die Autobahn").
C'est carré, formaté et ça reste sagement dans les clous. On aurait aimé plus de folie, d'extravagance, comme le laisse à penser la lecture de leur bio. On s'attend donc à ce que ça parte en vrille, à un moment ou à un autre, mais malheureusement ça n'est pas le cas. Dommage. Ceci dit, ce n'est pas parce qu'il manque de folie que cet EP ne mérite pas l'écoute, fortement conseillée !






Donde Estoy ?
1. Red Man (3:30)
2. La Ola (4:10)
3. Deverb (4:12)
4. The Shores of Danger (4:53)
5. Die Autobahn (4:12)
    

www.facebook.com/casablancadrivers






J-Yves